Shadow

Saint Nicolas 2010

Bulloises, Bullois,
Gruériennes, Gruériens et Amis de partout,
Chers «Toutes», chers «Tous», mes chers enfants surtout,

Avec le retour de décembre et pour la 66ème année consécutive, Saint Nicolas apparaît avec sa cohorte céleste dans cette bonne Ville de Bulle, grâce à la complicité des Tréteaux de Chalamala. Saint Nicolas adresse un salut et merci particulier à Nadine Dafflon qui a repris le flambeau de l’organisation de mon périple terrestre. Je suis venu pour vous donner les conseils d’usage, vous dispenser mes largesses tout au long de mes visites et surtout pour évoquer les évènements parfois tristes, parfois joyeux de ce pays. Par bonheur, le site « Wikileaks », dont l’objectif est la diffusion de documents ultrasecrets, n’a pas pu mettre en ligne les câbles paradisiaques.

Une nouvelle fois, vous étiez nombreux à patienter dans le froid hivernal pour accueillir ma venue. Et dieu sait que cet accueil chaleureux réchauffe le vieux cœur de Saint Nicolas ! J’ai pu constater en effet que votre ferveur pour cette tradition vivante était demeurée intacte, et que, parmi vous, nombreux étaient ceux qui la découvraient pour la première fois, Bulle ayant passé le cap des 18’000 habitants ! Je dois ici d’ailleurs adresser mes sincères remerciements aux enseignants bullois, qui perpétuent notre tradition auprès de vous, mes chers enfants ! Les tabloïdes paradisiaques ont en effet rapporté que le cirque Knie, la Corrida et la Saint-Nicolas faisaient partie des trois événements incontournables du calendrier scolaire ; que cela me fait plaisir ! Bulle est dynamique, Bulle est rayonnante ; une « bulle » éclatante ? Ne négligez pas, mes chers, l’importance de l’intégration de toutes ces nouvelles têtes. Saint Nicolas lance un appel à la tolérance, à l’heure où un semblant de racisme refait surface en Europe et la peur de l’étranger, à supposer que ce terme déshonorant puisse être utilisé, réveille les passions. Votre rôle, ici, mes enfants, est primordial ; montrez l’exemple à vos seniors, montrez-leur que vous êtes tous égaux et faits pour vivre ensemble ! Les vertus de l’intégration ont été démontrées par de multiples exemples : citons Giulio, cet Italien si gruérien, qui ne s’est jamais guéri de « sa » Gruyère et dont la vie d’émigré italien dans cette région a été retracée dans le livre de Michel Gremaud, « Les deux patries de Giulio l’Italien ».

Je vous ai toujours répété que Saint Nicolas était un trait d’union entre les enfants et les aînés. Ceci est d’autant plus important que nos statisticiens paradisiaques ont relevé un nombre considérable de centenaires ! Je tenais, là, à adresser mes meilleurs vœux aux nombreux jubilaires de cette Ville de Bulle ! Tato Berset, Georgette Luisoni, Dorothée Overney, Simone Trezzini, Jeanne Zimmermann (Sœur Jeanne-Louise) tous ont désormais plus d’un siècle ! Cinq siècles d’histoire ! Saluons encore ce cher Pierre Gremion, qui défie le temps et qui, du haut de ses 108 ans, est le doyen des Suisses. Imaginez, 108 fois Saint-Nicolas !

Cette Suisse est porteuse d’espoir et forte. Elle l’a démontré dans diverses activités, notamment en sport. Qui parmi vous n’a-t-il pas zieuté au travers de cette lucarne, que vous nommez télévision, et vibré devant les exploits sportifs de certains champions lors des JO d’hiver de Vancouver ? Didier qui rit, Didier qui pleure ; alors que Cuche rate le coche de la médaille olympique, Défago rafle l’or dans la prestigieuse discipline de la descente. Simon Amman, votre Harry Potter national, s’est envolé vers les cieux pour décrocher deux médailles d’or, à l’instar de Cologna, qui a gonflé d’une bien belle manière le palmarès des Suisses. Clin d’œil à Jean-Marc Berset, qui a roulé vers deux titres mondiaux aux championnats du Monde de paracyclisme. Aucune excuse pour la Suisse, par contre, qui était sans imagination lors de la Coupe du Monde en Afrique du Sud. Les Suisses ainsi que vous, mes chers enfants, avez pleuré l’élimination de votre équipe, tout en vous consolant avec la victoire historique sur l’Espagne, championne du monde ! L’espace d’une soirée, la corrida était helvétique et le taureau bullois s’est mué en emblème espagnol. Finalement, la Suisse peut se targuer d’être la seule équipe à avoir battu les champions du monde !
Je vous parlais de tolérance tout à l’heure, et cela est aussi valable, en ce qui concerne la religion. L’an dernier vous interdisiez les minarets ; cette année, certaines croix des sommets fribourgeois ont été profanées et puis, on débat sur les crucifix à l’école. Autant de symboles qui incarnent les croyances individuelles, sur lesquelles Saint Nicolas vous encourage à dialoguer plutôt qu’à vous enfermer dans des cloisons dangereuses. J’ai ici aussi une pensée émue pour Mgr. Bernard Genoud, feu votre cher évêque, l’ami du peuple. Philosophe et musicien, il représentait un exemple d’ouverture pour chacun de nous. Homme populaire, homme de dialogue, homme de proximité, Mgr Bernard Genoud a bien mérité son « enciellement ».

Comme vous le savez, le bal des chaises musicales représente toujours un moment amusant pour Saint Nicolas et mérite une petite mention. Hans Rudolf Merz boucle les comptes et Moritz Leuenberger éteint la lumière après être arrivé au bout du plus long tunnel ferroviaire du monde. Journée historique pour les femmes, Simonetta Sommaruga minorise la gente masculine au Conseil fédéral alors que Johann Schneider-Ammann remporte le deuxième siège laissé vacant. L’ours bernois peut à nouveau danser au-dessus de la fosse.

Au chapitre gastronomique, le chocolat, qui a été dans tous ses états chez Nestlé avec les emballages de Nelly Wenger, a retrouvé un nouvel écrin et demeure un symbole national fort. Saint Nicolas a vu ses papilles gustatives réveillées en constatant l’énorme succès de la Maison Cailler, qui fait du chocolat une attraction touristique ! N’en abusez pas tout de même, surtout vous mes enfants, bien que je sache qu’il est si difficile de résister au goût affriolant de la fève cacaotière ! Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que mes angelots l’ajoutent malicieusement dans les cornets de friandises fabriqués dans nos ateliers paradisiaques. Un autre symbole, cantonal cette fois-ci, n’a quant à lui pas résisté aux lois, ou si je puis dire aux ravages de l’économie. Carlsberg a sabré Cardinal en prenant la décision de fermer définitivement l’usine fribourgeoise.

Mes félicitations vont enfin aux personnes et associations qui ont animé la vie culturelle gruérienne et bulloise : citons ici entre autres Pierre Martignoni, qui a composé la messe « Notre-Dame de Compassion » à l’occasion de la 20ème rencontre des Céciliennes de la Part-Dieu ; Lionel Chappuis et le Club des accordéonistes de Bulle, qui ont présenté « Starmania » et comblé un public ravi, ou alors encore les 1989 chanteurs, petits et grands, qui ont entonné « Lyôba » d’une même voix sous la direction de Thierry Dagon. Finalement, félicitations au peintre Dominique Gex, vieil ami de Saint Nicolas, qui s’est autorisé une odyssée parisienne pour une exposition à la galerie Ti Art, où il a reçu le prix Bedikian. Saint Nicolas ne voudrait pas manquer de féliciter encore les metteurs en scène Nicolas Gremaud, Théo Savary et Guy Delafontaine assisté par Jo Oberson, qui ont successivement monté de manière brillante les spectacles « Deux gros lots » de Yves Péneau, « Voyage organisé », une création collective adaptée des célèbres « Bidochons » et enfin les « Nouvelles brèves de comptoir », de Jean-Marie Gourio. Les Tréteaux de Chalamala ont une nouvelle fois contribué à l’enrichissement culturel de la région !

Tout en étant présentement sur Terre, revenons quelques instants dans les airs. Il y a 100 ans, les assoiffés d’azure inventaient l’aviation suisse. Saint Nicolas rend hommage à ces premiers fous volants qui ont révolutionné la vie humaine : en particulier les pionniers gruériens George Cailler, Léon Progin et Louis Cosandey, trois destins hors du commun ! Leurs ailes de géant ont inscrit une page dans cette remarquable histoire qui se perpétue aujourd’hui grâce à Solar Impulse, qui a volé pour la première fois et signé un exploit retentissant. Cette aviation ne peut pourtant pas défier les forces de la nature à tout moment. Sur de très nombreux aéroports, les avions sont restés cloués au sol le printemps dernier ! Le nuage de cendres a semé la pagaille au nord de l’Europe et a entraîné la fermeture de nombreux espaces aériens. Rendez-vous compte, Eyjafjöll, le volcan islandais capricieux et têtu, a même craché ses cendres jusqu’au Paradis ! Nos contrées se sont ainsi retrouvées « cendres dessus dessous » ! La catastrophe a pu être évitée grâce à l’action coordonnée de Saint Pierre et de mes honorables angelots. Voyez à quel point leur solidarité a permis à Saint Nicolas d’entamer son périple terrestre, qui se trouvait menacé par des cendres envahissantes et perturbatrices. Que de péripéties !

C’est sur cette note positive que Saint Nicolas et sa cohorte céleste vont prendre congé de vous. Mais, dans l’immédiat, j’aurai le plaisir de vous retrouver ce soir, à l’Hôtel de Ville, où vous pourrez participer au loto et assister à cette saynète originale intitulée «Le Paradis cendres dessus dessous», signée Jacques Tissot et mise en scène par Josiane Oberson.

C’est avec un plaisir toujours renouvelé que Saint Nicolas vient en Gruyère, à Bulle, pour vous rencontrer et vous distribuer ces fameux biscômes au miel du Paradis.

Merci de votre fidélité. Merci encore de votre chaleureux accueil. Saint Nicolas vous serre contre son vieux cœur et vous dit à bientôt ! Un bon décembre, de bonnes fêtes, et à l’année prochaine.

Saint Nicolas vous bénit !

Saint Nicolas, Evêque de Myre

Par procuration : Jean-Bernard Tissot
Bulle, le 5 décembre 2010 / JBT